Sunil Gupta : Une vie qui émeut

Une humanité maussade ressort de l’exposition du photographe Sunil Gupta. À l’affiche au Musée canadien de la photographie contemporaine, l’exposition traite d’immigration, de la famille et du VIH.

En entrant dans la salle d’exposition, le public plonge dans la vie du photographe d’origine indienne, Sunil Gupta. La présentation regroupe deux séries de photos, Sécurité sociale (1988) et Terres d’affinités (2001-2003). Les deux périodes de la vie de l’artiste, un passé et un présent, font ressentir un malaise qui intrigue.

La première série trace le parcours de la famille Gupta après leur arrivée au Canada. En bas de vignettes, leur histoire est racontée par la mère du photographe. Toutes les photos de cette série paraissent tirées d’un album de famille : elles ne sont ni parfaites, ni particulières, mais elles illustrent des moments de leur vie.

Parmi tous les clichés, un trait ressort : les sourires sont presque entièrement absents. Les parents de Gupta, sur fonds champêtres et urbains, semblent touchés par un vide profond.

L’isolation culturelle du nouveau pays pousse Gupta et sa sœur à s’éloigner de leurs parents pour faire leur propre vie. Les obstacles de l’immigration transparaissent également, notamment dans un cliché qui souligne les difficultés du père à se trouver un emploi.

L’orientation sexuelle de Gupta joue aussi un rôle important dans le projet artistique. Il figure dans plusieurs images avec un copain. Sous une autre photo, sa mère espère qu’il se trouvera un jour une épouse.

Ce thème résonne dans la seconde série d’images. Sunil Gupta est atteint du VIH. Il présente dans Terres d’affinités une interprétation humaine et « anodine des paysages où se répand se fléau », écrit-il.

L’inspiration de Gupta naît de la distance psychologique qui le sépare de son Inde natale. Bien qu’étant un souvenir lointain, l’Inde demeure une de ses terres d’affinités, tout comme les États-Unis et l’Angleterre le sont devenus.

Les photos en paires confrontent les images de l’occident aux perspectives indiennes. Et le symbolisme y est puissant. La tombe d’un ancêtre Guptal mort pendant la seconde guerre mondiale s’oppose au corps dénudé de l’artiste. La juxtaposition rappelle au public que la mort pourchasse le photographe.

Une autre paire de photos compare une statue de Bouddha, irradiant la justice, à une affiche dénonciatrice d’une attaque homophobe. La discrimination est un autre motif qui se ressort de l’exposition.

Guptal a recours aux paysages colorés et visuellement excitants. Les teintes contrastées accentuent les différences qui séparent les paires d’images. Sunil Gupta réussit à transmettre l’intensité de sa quête d’appartenance et de son combat contre la maladie.

L’ensemble des photos de l’exposition révèle les paradoxes culturels de l’artiste. La présentation autobiographique attire et fait réfléchir, bien qu’on ne puisse échapper à une certaine tristesse provoquée par les images. Sunil Gupta a habilement su créer une œuvre qui éveille l’empathie.

L’exposition de Sunil Gupta est à l’affiche jusqu’au 23 avril 2006, au Musée canadien de la photographie contemporaine : 1, canal Rideau, au centre-ville d’Ottawa.

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