David McGuinty : Votre fidèle serviteur

Quand David McGuinty a décidé de se lancer en politique, c’est une tradition familiale qui le précédait. Le député d’Ottawa-Sud, dont les nombreux diplômes placent au rang d’érudit, est aujourd’hui critique de l’environnement au sein de l’opposition fédérale libérale. Homme de famille et politicien faisant de plus en plus sa marque, David McGuinty pense avant tout aux besoins de ses concitoyens.

Le député, dont l’horaire constamment chargé pousse à faire de longues heures chaque semaine, m’a donné rendez-vous au Parlement, son principal lieu de travail. Le lobby de la Chambre des communes est agité par le fourmillement des journalistes impatients de trouver le prochain scoop. David McGuinty m’entraîne avec lui et me fait pénétrer dans un monde méconnu du grand public.

Nous nous installons dans le lobby de l’opposition, salon où se préparent les députés avant de faire leur entrée en Chambre. Dès notre arrivée, David McGuinty en sa qualité d’éducateur, me fait faire le tour de cette salle, les véritables coulisses du pouvoir.

« Vous n’avez pas le droit d’entrer, mais vous voyez ici les députés de la Chambre », m’indique-t-il en me montrant la porte d’accès à l’assemblée des députés, dans un français presque impeccable. Le député est, en effet, aussi à l’aise en anglais qu’en français.

L’endroit où nous nous installons ne laisse aucun doute du sentiment qui règne dans la salle : « Notre premier ministre est un menteur » peut-on lire sur une affiche écrite à la main glissée sous le verre de notre table.

David McGuinty partage ce léger dédain pour la manière dont Stephen Harper dirige le pays. Selon le député, le premier ministre agit en mode préélectoral depuis son élection en janvier 2006. Il critique plus particulièrement les publicités négatives lancées il y a quelque temps contre son nouveau chef, Stéphane Dion.

« Les conservateurs ont employé la même tactique avec mon frère [Dalton McGuinty] quand il est devenu chef du Parti libéral de l’Ontario », critique David McGuinty. Selon lui, cette méthode privilégiée par les conservateurs vise à tuer l’oiseau dans l’œuf.

David McGuinty semble entretenir une bonne relation avec M. Dion. Les deux hommes partagent d’ailleurs un passé d’universitaire. Le parcours de M. McGuinty comprend un diplôme en agriculture du Collège de Kemptville, un baccalauréat en littérature anglaise de l’Université d’Ottawa, un diplôme en droit civil et en droit comparé de l’Université de Sherbrooke à Québec, un baccalauréat en droit de l’Université d’Ottawa, ainsi qu’une maîtrise en droit de la School of Economics and Political Science de Londres.

Mais la conscience écologique du critique libéral en matière d’environnement ne date pas d’hier. David McGuinty a été conférencier en droit de l’environnement au King’s College de l’Université de Londres au début des années 1990, en plus d’avoir été PDG de la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie du premier ministre en 1995.

Inutile de dire qu’il est déçu de la direction que prend en ce moment le gouvernement fédéral pour la protection de l’environnement. Il souhaite d’abord que le commissaire à l’environnement devienne indépendant et qu’il puisse rendre des comptes à la Chambre des communes. De plus, il critique la feuille de route du gouvernement dans le domaine.

« Voulez-vous des preuves, demandait-il dans un discours prononcé devant la Chambre verte, le 8 février 2007. Les voici : des compressions de 395 millions $ dans le programme ÉnerGuide pour la rénovation des maisons; 500 millions $ de moins dans le programme ÉnerGuide pour les ménages à faible revenu; le retrait de 250 millions $ au Fonds du partenariat pour les projets de lutte contre les changements climatiques que les libéraux avaient conclus avec les provinces et les municipalités. »

Il déplore également l’amputation des programmes d’encouragement au développement d’énergies alternatives, la mort du Défi d’une tonne, les coupures au Fonds pour le climat visant à réduire la concentration des gaz à effet de serre, les compressions aux programmes de lutte contre les changements climatiques et l’abandon de toute bourse du carbone par le gouvernement.

Mais l’environnement n’est pas sa seule priorité. Son engagement pour les grandes questions politiques prend d’ailleurs racine dans son historique familial.

« J’ai toujours été très intéressé par les affaires publiques depuis un jeune âge, à peu près sept ou huit ans mes parents, mon père surtout, étaient très impliqués dans la politique locale », précise-t-il.

En effet, son père a été conseiller scolaire pendant presque 20 ans, en plus d’être député provincial d’Ottawa-Sud entre 1987 et 1990. Cette circonscription est d’ailleurs le château fort de la famille McGuinty. C’est là que son frère, Dalton – aujourd’hui premier ministre de l’Ontario – a été élu après la mort du père McGuinty en 1990. Et c’est maintenant cette circonscription que représente David au fédéral.

« En 1988, j’avais pensé d’entrer en politique quand j’avais l’âge de 28 ans. Je craignais à ce moment-là que je n’avais pas assez d’expérience de vie, sauf l’école. Donc, je suis devenu avocat et mon épouse et moi avons décidé de quitter le pays, de ne pas me présenter et au lieu de passer presque une dizaine d’années à l’extérieur du Canada », m’a-t-il expliqué.

Aujourd’hui, c’est avec une perspective élargie de la place qu’occupe le Canada dans le monde qu’il exerce son travail. « J’ai vu que les gens se tournent vers le Canada pour voir comment nous faisons, que notre pays a une grande influence internationale. »


Son élection, après plus d’une décennie de retard, a tout de même constitué un événement historique. « Lors de mon élection à Ottawa-Sud, c’était la première fois que deux frères représentaient la même circonscription à deux niveaux en même temps », explique M. McGuinty.

Bien que cette situation ait d’abord entraîné un certain doute dans son esprit, David McGuinty est aujourd’hui en toute confiance.

Devant les journalistes, son aise est d’ailleurs désarmante. Son regard franc, assuré, mais avant tout sympathique lui donne un charisme indéniable. Les caméras ne sauraient guère l’intimider et les mots lui viennent tout simplement. Aujourd’hui, les questions portent sur l’élection de 2006 dans sa circonscription.

« Le premier ministre du Canada, lors de la dernière élection, est venu dans ma circonscription pour ouvrir le bureau de campagne d’un candidat nommé Allan Cutler », affirme-t-il aux journalistes regroupés autour de lui.

« Quand il est venu dans ma circonscription, on lui a demandé directement : "Monsieur Harper, avez-vous autorisé une entente pour payer un certain Allan Riddell, qui était le candidat conservateur dans Ottawa-Sud, pour faciliter l’entrée de M. Cutler dans la course?" Monsieur Harper a répondu "il n’y jamais eu d’entente de ce genre" », a-t-il poursuivi.

« La Cour supérieure de l’Ontario vient tout juste de forcer le Parti conservateur du Canada à payer 50 000 $ à Allan Riddell pour cette entente que le premier ministre du Canada a nié avoir faite. (…) Rien de cela n’a été exposé, le premier ministre n’a jamais répondu à la question, pourquoi a-t-il nié qu’il y avait eu une entente. On sait qu’il y a eu une entente, il vient de signer le chèque, on ne sait pas quel en est le montant, il devrait avouer et nous dire pourquoi », a exigé David McGuinty, incisif.

Clairement, le député n’a pas froid aux yeux surtout lorsque vient l’heure des comptes. En effet, un service public de qualité demeure la principale raison pour laquelle M. McGuinty s’est lancé en politique.

« Je tiens à aider les gens de ma circonscription », soutient-il. Et il ne s’arrête à rien pour le faire, bien que cela soit très exigeant physiquement et moralement.

« C’est très difficile et je pense que je dois reconnaître, je ne pense pas que je pourrais poursuivre cette carrière présentement si je n’habitais pas à un maximum de deux heures du Parlement », admet-il.

« Si j’étais à Winnipeg ou à Halifax, ce serait extrêmement difficile pour l’âge de nos enfants. Puis, il ne faut pas oublier qu’être député ce n’est pas un boulot, c’est plutôt un style de vie. Parce que ça consomme 70 à 80 heures par semaine minimum. »

Issu d’une famille de douze enfants, il est primordial pour M. McGuinty de faire concorder famille et travail. David McGuinty se souvient d’ailleurs des commentaires que lui ont faits ses enfants après son élection en 2004.

« Mes enfants sont revenus de l’école un jour et m’ont dit "Papa, tu sais quoi, tous les enfants nous disent que nous sommes riches!" et je ne pouvais pas comprendre pourquoi. »

Après mûre réflexion, le député s’est aperçu que son élection l’avait mis en vedette dans les médias locaux et qu’habituellement ce sont les riches célébrités qui font la manchette. C’est ainsi qu’il s’explique la drôle d’observation que lui ont rapportée ses enfants.

Ce style de vie, David McGuinty semble tout de même en faire le sien : « Cette fin de semaine j’ai trois événements auxquels je dois participer, j’ai deux rencontres médiatiques dimanche matin à faire, qui inclut Question Period pour CTV », m’indique-t-il les yeux pétillants.

L’heure du dîner déjà terminée, le député McGuinty part à la course. Je le suis avec peine dans les corridors du Parlement puisque son pas rapide et sa grande taille lui donnent presque des ailes.

Soixante-dix élèves de 5e année de l’école primaire Chapel Hill attendent la chance de rencontrer leur député. L’entretien porte sur plusieurs sujets, mais principalement sur le travail qu’accomplit quotidiennement M. McGuinty.

« Mon travail est de représenter 120 000 personnes, 84 000 électeurs, 82 langues parlées, 110 pays ou origines différentes. Alors, vous vivez dans une nouvelle sorte de communauté. C’est ce que j’appelle les Nations-Unis d’Ottawa-Sud », a-t-il expliqué aux élèves. En effet, le travail de David McGuinty repose largement sur l’aide aux minorités ethniques et à l’immigration dans sa circonscription.

« Les gens viennent me voir et disent "Monsieur McGuinty, j’ai besoin de votre aide. Demain, je dois me rapporter à l’aéroport parce qu’on veut me déporter du Canada. Pouvez-vous empêcher ceci?" Ou quelqu’un va m’appeler et me dire "Monsieur McGuinty, ma fille est au Vietnam, elle est en voyage pendant les vacances et elle a perdu son passeport. Et elle ne peut pas rentrer à la maison. Pouvez-vous nous aider?" », donne-t-il comme exemple aux enfants, tout ouïe.

Quant à son avenir en politique, David McGuinty ne sait pas encore ce qui l’attendra. Pour l’instant, il prévoit continuer de représenter Ottawa-Sud jusqu’à l’âge de 50 ans, soit dans deux ans et demi. À ce moment-là, il réévaluera sa situation familiale et ses succès.

Par contre, il connaît déjà certaines des possibilités qui l’attendent. « Je reçois des offres du secteur privé, récemment on m’a demandé de travailler à Washington, DC. », me confie-t-il. « Je pourrais retourner à l’étranger, ou alors j’aimerais enseigner. »

À en juger par son dynamisme auprès des élèves venus le visiter et par ses excellentes qualités d’orateurs, le député s’en tirerait sûrement très bien à la petite école. Mais pour le moment, David McGuinty continue de foncer en politique et de servir fidèlement les Canadiens.

-Nathalie Caron

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